Quand les animaux marins disparaissent pour vivre !

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Les animaux marins se camouflent

HOSTILE… S’il est un terme qui pourrait décrire le milieu marin, ce serait sans nul doute celui-ci. Un milieu où le malheur des uns fait le bonheur des autres. Où les dures lois de la survie obligent les animaux marins les moins bien équipées à faire leur, cette devise bien connue : « pour vivre heureux, vivons cachés »… ou plutôt soyons discrets.

  • Se cacher: un instinct efficace des animaux marins

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Au petit matin, la girelle réapparait !

Pour se protéger, le moyen certes le plus primitif, mais quasi universel dans le monde animal, est sans doute l’action de se cacher. D’autant plus qu’un animal qui doit se cacher n’a souvent que ce moyen pour se défense. Une espèce bien armée n’aura pas ce besoin vital. C’est ainsi que les zones rocheuses et autres récifs coralliens deviennent de vrais oasis où la vie abonde tant les refuges sont nombreux. Par conséquent, ils sont aussi le théâtre de « crimes » quotidiens du monde animal. Un instant d’inattention y est souvent fatal !

Dans d’autres milieux plus exposés tels que les fonds meubles, certaines espèces tirent leurs forces de leur déroutante faculté de disparition. Par exemple, quand il se sent menacé, le poisson que l’on appelle rason, Xyrichtys novacula, plonge la tête la première dans le sable, pour y enfouir en une fraction de seconde l’intégralité de son corps, échappant ainsi à son prédateur. De la même manière, la girelle commune Coris julis, si démonstrative et abondante le jour sur nos côtes méditerranéennes, disparaît totalement la nuit… Elle la passe en réalité enfouie sous plusieurs centimètres de sable.

C’est à un rythme différent, d’une lenteur déconcertante, que ces dernières seront peut-être rejoint par une étoile peigne Astropecten bispinosus ou un casque granuleux Phalium granulatum, entamant ou clôturant une partie de chasse. Ceux-ci se nourrissent d’ailleurs en grande partie d’oursins irréguliers qu’ils débusquent dans le sable. Oursins, qui passent la majeure partie de leur vie enfouis. Leurs piquants ressemblent plus à d’épais poils qu’ils utilisent pour l’enfouissement. Finalement, cela montre bien qu’une espèce cachée peut se passer d’un moyen de défense pourtant efficace.

  • Se déguiser: un bal masqué sous la mer

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L’oursin violet se camoufle !

Pendant que les uns s’agitent à trouver un refuge, d’autres s’épanchent sur leur garde-robes. Évidemment le but n’est pas de séduire, une coupe de champagne à la pince, mais toujours de passer inaperçu, et si possible de ne faire plus qu’un avec le décor. C’est ainsi que l’oursin violet, Sphaerechinus granularis, un peu gros pour être inapparent, et peu repoussant avec ses courts piquants, amasse sur son test une multitude d’objets trouvés à portée de podias. Tout y passe: coquilles, algues, feuilles de posidonie, et même déchets.

Pendant ce temps, la petite araignée de mer Maja crispata cultive sur sa carapace une vraie prairie d’algues qu’elle coupe et place à l’aide de ses pinces. L’armure du crustacé possède une multitude de crochets microscopiques permettant la fixation de végétaux. Elle pourra alors se balader sans crainte sur les rochers en quête de nourriture.

  • Les chromatophores: un outil imparable pour mieux disparaître

Alors que certains animaux doivent « bricoler » pour se cacher, d’autres ont acquis au cours du temps, les moyens qui leur permettent de le faire instantanément. Grâce à des cellules appelées « chromatophores », se camoufler devient un jeu d’alevin. On parle de camouflage lorsqu’un être vivant prend l’apparence de son environnement.

Chromatophores

Chromatophores

Les chromatophores sont une sorte de cellules « élastiques » du tégument, remplies de pigments de couleurs (différents selon les espèces), ou de lamelles réfléchissantes. Ils ont la particularité de se contracter ou de se dilater. La couleur apparente de la cellule varie selon les couleurs présentes dans l’environnement direct de l’animal. Ce mode de camouflage est appelé « homochromie », et est utilisé dans le milieu marin essentiellement par des représentants des poissons et des céphalopodes.

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Rascasses brunes

A ce jeu là, chacun son environnement, et chacun sa spécialité. C’est ainsi que tout plongeur est forcement passé à quelques centimètres d’un poulpe immobile imitant à merveille les couleurs des algues brunes, ou des rochers sur lesquels il est posé, sans s’en rendre compte; ou bien s’est retrouvé nez-à-nez avec une charmante rascasse, les épines relevées pour se défendre, car elle, l’a bien vu venir !

Parfois, sur les rides du sable, une portion ovale semble se détacher pour planer sur quelques mètres, avant de se reposer, et de disparaître à nouveau. Ce n’est pas une hallucination, simplement une sole. Le camouflage est d’une précision telle qu’il tient compte des différentes teintes et granulométries du sable. Qu’il soit clair, foncé, fin ou grossier, en une fraction de seconde, le temps de « paramétrer » les chromatophores, l’imitation est faite. La seiche, elle, semble même jouer de ses dons d’illusionniste, et selon son humeur, de véritables vagues de couleurs sombres et claires déferleront sur son corps.

En pleine eau, malgré l’absence de substrat à imiter, les poissons ne sont pas en reste. D’ailleurs la sélection naturelle est passée par là, et l’on ne retrouve que des espèces capables de refléter la lumière et le bleu de l’eau. On les nomme souvent les « poissons bleus ». Les sardines, anchois, maquereau, etc., ont la partie supérieure du corps sombre, se confondant avec les fonds sombres, et la partie inférieure brillante, se perdant dans les éclats du soleil. C’est ce qu’on appelle l’ombre inversée.

  • Jouer la transparence… et les couleurs apparaissent !

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Periclimenes scriptus

Contrairement à des animaux qui jouent des couleurs pour ne pas être vu, et peut-être séduire une femelle de passage, il est parfois bien utile de miser sur la transparence. Les crevettes du genre Periclimenes, sont particulièrement douées dans ce domaine. En Méditerranée, on les trouve bien souvent au milieu des tentacules de l’anémone charnue. Leurs corps laissent complètement transparaître les couleurs du cnidaire dont ils prennent la teinte, et hop, le tour est joué ! Il est même difficile pour le photographe de les repérer, il faut en général bien fouiller au milieu des tentacules. Certaines espèces ont également colonisé les gorgones comme sur cette image au cœur des ramures d’une gorgone rouge.

Certaines méduses, salpes ou autres cténaires qui vivent en pleine eau, deviennent facilement invisibles à la vue des prédateurs. Composées majoritairement d’eau, elles font certainement partie des êtres vivants les plus transparents de la planète.

  • Mimer: un jeu de rôle

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Deux simnies sur une gorgone blanche !

Quoi de plus efficace que de ressembler à un être redouté, et ayant peu de prédateurs? C’est en effet la solution choisie par quelques surdoués du mimétisme. On se rend compte alors que l’évolution des espèces réserve souvent des surprises insoupçonnées. Encore plus lorsque deux espèces éloignées évoluent physiquement dans la même direction. Bien sûr, et c’est le but, une seule en tire profit. L’espèce la plus faible va tendre à ressembler à l’espèce la mieux équipée, et ainsi échappera aux prédateurs en profitant de ses atouts.

Sur les gorgones de Méditerranée, vit un petit coquillage, la simnie blanche Neosimnia spelta. Celle-ci, se nourrit des polypes et prélève des pigments de la gorgone. Ils colorent alors son manteau qu’elle déploie sur la coquille. Que la gorgone soit blanche, jaune, ou rouge, la simnie passe facilement inaperçue.

Bien loin de là, dans l’Indo-Pacifique, l’holothurie à bouche rayée Pearsonothuria graeffei, a évolué de manière à protéger ses juvéniles. Ceux-ci, bien différents des adultes se font passer pour… un nudibranche du genre Phyllidia, la ressemblance est bluffante. Lorsque l’holothurie dépasse la taille de la limace, elle perd son mimétisme, et prend ses couleurs adultes. L’intérêt? Ces limaces stockent une substance toxique qu’elles prélèvent dans les éponges dont elles se nourrissent, les rendant indigestes. Elles ne sont pas attaquées, l’holothurie juvénile ne le sera pas non plus. Comme on dit « dans le doute, abstiens-toi! ».

Pearsonothuria graeffei adulte
Phyllidia varicosa
Pearsonothuria graeffei juvénile

 

Thaumoctopus mimicus © Elias Levy – Wikimedia Commons

Le champion toutes catégories du mimétisme serait certainement le poulpe Thaumoctopus mimicus que l’on peut rencontrer dans les eaux indonésiennes. Déjà doté d’incroyables dons de camouflage, celui-ci en fonction du danger, va choisir de prendre l’apparence d’une rascasse volante ou celle d’un serpent marin. Pour se déplacer, il adoptera sur le sable la silhouette et la nage d’une sole et en pleine eau celle d’une méduse. Instinct ou apprentissage, le débat reste ouvert et l’espèce fait l’objet de nombreuses études scientifiques…

De multiples stratégies, pour un seul but… vivre. Ces quelques exemples montrent la complexité du monde vivant. Il faut avoir dans l’esprit que pour toutes ces adaptations réussies, un nombre incalculable d’adaptations infructueuses apparaissent et disparaissent en permanence. De cette « cuisine génétique » naît la biodiversité.

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